Paul Courtin

« Une bouteille à la mer » 

           Amis, ne soyez pas désorientés… Les peintures et aquarelles que nous lègue André Vayrette n’ont pas pour seul but de représenter l’image des gens et des choses. Une œuvre de Vayrette, c’est presque toujours un fond, un vide immense palpitant autour d’un sujet modeste : visage humble, objet de rien, fleur qui passe… peu de chose à voir sinon de la peinture.

           Mais, pour André VAYRETTE, c’est justement cet espace qui est le sujet : il y déverse tous ses sentiments d’hypersensible, toute sa science de peintre.

           Ce vide rayonne. De loin derrière. De loin là-haut. C’est le tableau qui nous éclaire du dedans de lui-même. Le peintre se perdait de longues semaines dans ces puits de lumière, les explorant d’un pinceau ivre de couleurs et de matières mystérieuses. Il ne cessait que lorsqu’il avait transfiguré et non pas « figuré ».

           Cette recherche nous fait comprendre ce qu’est réellement la peinture : s’il a si bien dit le visage de sa mère ou l’éclair bref de la fleur d’amandier, c’est par son don de sentir. Il a su en faire des « VAYRETTE » ; discrétion mais rayonnement, nuances des gris de cendre, des ors, des mauves ardoisés, des violets mystiques ; matières impalpables, spiritualité.

           Tout fut peint à POULX, dans la remise exiguë et obscure où il s’acharna !

« Poulx » – André Vayrette

André VAYRETTE commença vers sa vingt-cinquième année à ne plus penser qu’à la peinture. Lui, d’origine modeste, devint un déclassé, un marginal tragique. Il erra, seul, mais, en quinze années il acquit une culture très étendue et un métier complet de peintre.

           Quel chemin !

           A partir de 1965, il se barricade à POULX, renonce aux séductions de la couleur vive, regarde en lui-même et enfante ces toiles qui sont, disait-il :

« Ma manière à moi de descendre dans la rue ! »

           Malgré le dénuement aucune concession, et c’est de cette pauvreté même qu’a jailli son art : reproche tendre mais terrible pour notre matérialisme.

           Les officiels l’ont ignoré. Même l’accès au Musée de sa ville natale proposé après sa mort par les artistes se heurta à l’indifférence stérile.

           Comment pouvaient-ils comprendre, ces myopes du cœur, que le regard de cet enfant Nîmois était l’expression profonde de la réserve protestante et de la pudeur méridionale dites avec des moyens de vrai peintre ?

« L’œuvre est terminée

        La carrière commence »

Paul COURTIN    

« Autoportrait » – Paul Courtin
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